Lorsque j’étais en 12e année, j’ai été abordée par un gars au centre commercial. Il semblait très gentil. Les choses n’allaient pas très bien pour moi à la maison. Nous n’avions pas beaucoup d’argent. À l’école, on se moquait de moi parce que j’avais un vieil iPhone et que je ne portais pas de vêtements de marque.
Au cours des mois qui ont suivi, j’ai appris à le connaître. Il me disait que j’étais spéciale et il m’a couverte de fleurs et de cadeaux. Je lui ai fait confiance. Je nous croyais si proches.
Je prévoyais prendre une année de congé après le secondaire pour économiser de l’argent en vue de l’université. Il m’a dit que ce ne serait pas nécessaire. Il m’a invitée à vivre avec lui. Il a offert de me soutenir financièrement pendant que je suivais des cours. Il a dit que l’argent n’était pas un problème pour lui.
Je débordais d’enthousiasme à l’idée de vivre avec lui et de commencer l’université.
Il a payé mes frais de scolarité. Tout semblait parfait. Mais quelques semaines plus tard, le vent a tourné. Un jour, il m’a dit qu’il avait subi un imprévu et qu’il n’avait plus assez d’argent pour subvenir à nos besoins. Je devais l’aider à payer le loyer tout en économisant pour payer mes études l’année suivante. Il m’a dit que la meilleure solution était de travailler comme danseuse. Il m’a dit que c’était très bien payé et que ce n’était que temporaire.
J’avais mes doutes, mais quand j’ai abordé la question, il a menacé de me quitter. Les choses se sont aggravées. Il m’a dit que si je le quittais, je devrais lui rembourser mes frais de scolarité, sinon il s’en prendrait à moi et à ma famille.
J’ai cédé pour ne pas lui déplaire. À l’origine, je devais travailler comme danseuse quelques mois, le temps de s’en sortir. Pourtant, les mois se sont enchaînés et il n’y avait plus de fin en vue. Mon copain prenait tout l’argent et me donnait à peine de quoi manger. Parfois, il se montrait gentil et attentionné. Je faisais tout mon possible pour le rendre heureux. Je marchais sur des œufs, ne sachant pas quand son humeur allait changer. Je n’étais pas heureuse, mais je ne voyais pas de porte de sortie.
Un jour, tout a basculé. Entre deux cours d’université, j’ai assisté à une séance d’information de Services aux victimes Toronto au sujet du trafic sexuel. J’ai compris que j’étais prise dans cet engrenage.
Le jour même, j’ai appelé Services aux victimes Toronto et j’ai parlé à une conseillère. Elle m’a écoutée sans me juger. Elle m’a expliqué ce qu’était le trafic sexuel et quelles étaient les façons d’en sortir. Au cours des mois suivants, elle m’a aidée à trouver un logement et m’a mise en contact avec des services de soutien.
J’ai compris que je n’avais rien à me reprocher. J’ai enfin pu m’en sortir, sans me sentir jugée ou honteuse envers moi-même.